Le baiser d'Azraël
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Dans le judaïsme, Azraël est considéré comme l'Ange de la Mort... Lors d’un séjour à Barcelone, après la visite du Parc Güell et de la Sagrada Familia, plutôt que la balade sur les ramblas, faites, comme Brassens, le tour des cimetières. Le troubadour sétois ne chante-t-il pas :
"Le jour des morts, je cours, je vole
Je vais infatigablement
De nécropole en nécropole
De pierre tombale en monument".

Inauguré en 1775, le cimetière de Poblenou est le premier cimetière hors des murs de la ville en raison du manque d’espace. Il est parsemé de monuments funéraires, œuvres d'architectes et de sculpteurs des 19e et 20e siècles. Y sont visibles les tombeaux de la bourgeoisie de Barcelone, qui, même dans la mort, désire étaler opulence et réussite, faisant du cimetière un véritable musée en plein air.

La sculpture de Jaume Barba, "Le baiser de la mort" (1930), y est sans doute la pièce la plus remarquable et la plus célèbre.

L'ange de la mort, immortalisé en squelette ailé, y porte un drap, qui cache en partie, au regard du visiteur, mais pour mieux les exposer, des sinistres os nus. Le funeste ange s’incline sur un homme agenouillé et inerte, dans une posture d'abandon, ses mains touchant le sol. Il soutient l’homme, tout en embrassant son visage. Par ce baiser, il l’emmène dans son royaume de ténèbres. Cette sculpture est à la fois romantique et terrible, attirante et repoussante. Ne dirait-on pas que l’homme est en extase, comblé, attendant le départ ? La mort est-elle une libération réconfortante ou un événement tragique ? Ou bien l’homme attend-il son sort funeste, figé, glacé, sans espoir de fuite ?

Vers 1930, l'entrepreneur textile Josep Llaudet Soler (1879-1955) commande cette sculpture en marbre pour décorer la tombe de son fils, mort tragiquement en pleine adolescence. Des vers du poète Jacinto Verdaguer y Santaló (1845-1902) sont écrits en catalan sur la tombe, qu’on pourrait traduire ainsi :
"Mais son jeune cœur n’en peut plus ;
dans ses veines, le sang s'arrête et gèle
et l'esprit perdu avec la foi s'embrasse
se sentant tomber au baiser de la mort."

Cette statue est restée inconnue du grand public jusqu’aux JO de 1992. Depuis lors, elle fait partie de certains circuits touristiques ou visites guidées.

Construit aussi en raison du manque d’espace, le cimetière de Montjuïc, inauguré en 1883, possède un grand nombre de sépultures, panthéons et sculptures artistiques. Il abrite également un musée des… corbillards. De nombreuses personnalités célèbres y sont inhumées, entre autres, Isaac Albeniz (musicien), Ramón Casas et Joan Miró (peintres) et Carlos Ruiz Zafón (écrivain).

La statue "La solution" (1914) est remarquable. Son réalisme date du 19e siècle, lorsque les artistes cessent de montrer la mort comme un sujet solennel et l'introduisent dans l’art funéraire.

Nicolau Juncosa (1865-1932) est un important industriel et un homme politique barcelonais. Afin d’orner sa sépulture, de son vivant, il commande cette statue au marbrier Antoni Pujol. Cependant, celle-ci n’est achevée qu’après sa mort, le sculpteur ayant utilisé le masque funéraire du défunt pour le représenter.

Ce dernier semble réfléchir, ou rêver, la tête appuyée sur la main, son coude sur un livre. Il est comme vivant, et porte les vêtements de l'époque. A la hauteur de son coude droit sont gravées des cheminées d’usine, faisant allusion à son ancienne activité. Au-dessus de lui se dresse la Mort, immense squelette hiératique enveloppé d'un voile afin de mieux exposer ses funestes os. La Mort appuie une main tendre sur l'épaule du défunt, pour lui signaler qu’il est l’heure de partir et quitter cette terre.

C'est l'une des sculptures les plus connues du cimetière.

Sculptures affichées :
1 – Le baiser de la mort, Jaume Barba, 1930, Cimetière de Poblenou, Barcelone
2 – Sépulture de Nicolau Juncosa, Antoni Pujol, 1914, Cimetière de Montjuïc, Barcelone


Quelques lectures après une bonne balade :

Louis Creed, un jeune médecin de Chicago, vient s’installer avec sa famille à Ludlow. Leur voisin les emmène visiter le pittoresque "simetierre" où des générations d’enfants ont enterré leurs animaux familiers... Simetierre est un des chefs-d'œuvre de Stephen King.

Sans aller jusqu'à Barcelone, faites le tour des cimetières parisiens au moyen du Guide secret des cimetières parisiens qui propose une approche très singulière de 14 cimetières parisiens intra-muros.


Et voici "La ballade des cimetières" de Brassens, reprise façon jazz par André Chiron et le Coco Brival Gipsy Swing. 


Vous pouvez découvrir des cimetières avec une visite guidée

Joyeuses promenades au boulevard des allongés !



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