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Magritte, La Clairvoyance, 1936, Collection privée
Le
3 November 2016,
Où on commence par Magritte…
Allez voir la superbe exposition Magritte « La trahison des images », qui est actuellement au Centre Georges Pompidou, jusqu’au 23 janvier 2017 !
L'exposition propose une approche à ce jour inédite de l'œuvre de l'artiste belge René Magritte.
Rassemblant les œuvres emblématiques, comme d'autres peu connues de l'artiste, provenant des plus importantes collections publiques et privées, elle offre une lecture renouvelée de l'une des figures magistrales de l'art moderne. La trahison des images explore un intérêt du peintre pour la philosophie, qui culmine, en 1973, avec Ceci n'est pas une pipe que publie Michel Foucault, fruit de ses échanges avec l’artiste.
L’exposition contient des oeuvres venues du monde entier : de plusieurs musées des Etats-Unis, de Londres, de collections particulières… et même de la fondation Toyota. On y retrouve les tableaux les plus célèbres. Et si on a aussi vu le musée Magritte de Bruxelles.
En revenant de Beaubourg, on serait tenté de parler de Magritte, de s’épancher et disserter sur le surréalisme. Mais des livres et des livres ont déjà été écrits sur le sujet, que l’on peut trouver à l’excellente librairie du Centre Georges Pompidou, très très bien fournie.
Bon je me fends quand même de quelques explications :
Créé en 1924 par André Breton, le surréalisme est un mouvement littéraire et artistique né en France à la suite de la Première Guerre mondiale. Il est dans la continuité du mouvement Dada (un mouvement antibourgeois, antinationaliste et provocateur).
Le but du surréalisme est de créer une écriture, une peinture plus spontanée dans laquelle on ne se plie pas aux règles formelles et esthétiques de l’époque, pour faire place à la création sans contrainte. Pour André Breton, leur chef de file, le surréalisme est une recherche d'union entre le réel et l’imaginaire.
Magritte excelle dans la représentation des images mentales. Pour Magritte, la réalité visible doit être approchée de façon objectale.
Il possède un talent décoratif qui se manifeste dans l’agencement géométrique de la représentation.
L’élément essentiel chez Magritte, c’est son dégoût inné de la peinture plastique, lyrique, picturale. Magritte souhaite liquider tout ce qui est conventionnel. « L’art de la peinture ne peut vraiment se borner qu’à décrire une idée qui montre une certaine ressemblance avec le visible que nous offre le monde » déclare-t-il. Pour lui, la réalité ne doit certainement pas être approchée sous l’angle du symbole.
Parmi les tableaux les plus représentatifs de cette idée, La Clairvoyance (1936), nous montre un peintre dont le modèle est un œuf posé sur une table. Sur la toile, le peintre dessine un oiseau aux ailes déployées.
Je vous laisse aller voir de vous-même.
Un oiseau, un oiseau… pour continuer avec Jacques Prévert…
Jacques Prévert a tout d’abord appartenu au mouvement surréaliste. Jacques Prévert fait partie de ce mouvement littéraire de 1925 à 1929. Mais ce dernier est trop indépendant d'esprit pour faire partie d'un mouvement littéraire bien fixe. De plus, il supporte mal les exigences d’André Breton.
Il choisit alors de faire dans la simplicité et de prendre des thèmes de la vie quotidienne. Il s'intéresse à des thèmes qui étaient jusqu'ici considérés comme antipoétique (par exemple, le thème du travail, l’école).
Même s’il a peu écrit pendant sa période avec les surréalistes, ces années passées auprès d'eux, ont été pour lui une période de gestation. Et elle lui ont enfin permis d'être "lui-même ».
Malgré sa rupture avec Breton et ses amis, Prévert reste tout de même marqué par le surréalisme et il pense même que rêve et folie peuvent conduire à une toute autre réalité. Il aime aussi mêler le réel et le surréel : il introduit des éléments oniriques, fantastiques ou merveilleux dans un monde des plus réaliste ou bien il suffit de quelques métaphores pour que le lecteur tombe dans un monde surréel.
Prévert crée un style qui lui est propre où il mêle l’humour, la simplicité, le merveilleux ou le fantastique. Il aime beaucoup jouer avec les mots, il se détache de tout mouvement littéraire précis. Voici « Pour faire le portrait d’un oiseau » :
Peindre d'abord une cage
avec une porte ouverte
peindre ensuite
quelque chose de joli
quelque chose de simple
quelque chose de beau
quelque chose d'utile
pour l'oiseau
placer ensuite la toile contre un arbre
dans un jardin
dans un bois
ou dans une forêt
se cacher derrière l'arbre
sans rien dire
sans bouger...
Parfois l'oiseau arrive vite
mais il peut aussi bien mettre de longues années
avant de se décider
Ne pas se décourager
attendre
attendre s'il le faut pendant des années
la vitesse ou la lenteur de l'arrivée de l'oiseau
n'ayant aucun rapport
avec la réussite du tableau
Quand l'oiseau arrive
s'il arrive
observer le plus profond silence
attendre que l'oiseau entre dans la cage
et quand il est entré
fermer doucement la porte avec le pinceau
puis
effacer un à un tous les barreaux
en ayant soin de ne toucher aucune des plumes de l'oiseau
Faire ensuite le portrait de l'arbre
en choisissant la plus belle de ses branches
pour l'oiseau
peindre aussi le vert feuillage et la fraîcheur du vent
la poussière du soleil
et le bruit des bêtes de l'herbe dans la chaleur de l'été
et puis attendre que l'oiseau se décide à chanter
Si l'oiseau ne chante pas
c'est mauvais signe
signe que le tableau est mauvais
mais s'il chante c'est bon signe
signe que vous pouvez signer
Alors vous arrachez tout doucement
une des plumes de l'oiseau
et vous écrivez votre nom dans un coin du tableau.
Jacques PRÉVERT Paroles 1945
©1972 Editions Gallimard
Ne pas hésiter à acheter l'album de l’exposition ou le catalogue de l’exposition
Et le recueil Paroles de Jacques Prévert
Au vu de l’extrême affluence à l’exposition, pour ceux qui n’aiment pas la foule et l'attente, privilégier les visites en « nocturne » (horaires : Tous les jours (sauf mardi) de 11h à 21h - Nocturne jusqu'à 23h tous les jeudis soirs, et tous les lundis soirs).
Pour découvrir l'exposition avec une visite guidée, cliquez ici
Bonne visite et bonne lecture !
Allez voir la superbe exposition Magritte « La trahison des images », qui est actuellement au Centre Georges Pompidou, jusqu’au 23 janvier 2017 !
L'exposition propose une approche à ce jour inédite de l'œuvre de l'artiste belge René Magritte.
Rassemblant les œuvres emblématiques, comme d'autres peu connues de l'artiste, provenant des plus importantes collections publiques et privées, elle offre une lecture renouvelée de l'une des figures magistrales de l'art moderne. La trahison des images explore un intérêt du peintre pour la philosophie, qui culmine, en 1973, avec Ceci n'est pas une pipe que publie Michel Foucault, fruit de ses échanges avec l’artiste.
L’exposition contient des oeuvres venues du monde entier : de plusieurs musées des Etats-Unis, de Londres, de collections particulières… et même de la fondation Toyota. On y retrouve les tableaux les plus célèbres. Et si on a aussi vu le musée Magritte de Bruxelles.
En revenant de Beaubourg, on serait tenté de parler de Magritte, de s’épancher et disserter sur le surréalisme. Mais des livres et des livres ont déjà été écrits sur le sujet, que l’on peut trouver à l’excellente librairie du Centre Georges Pompidou, très très bien fournie.
Bon je me fends quand même de quelques explications :
Créé en 1924 par André Breton, le surréalisme est un mouvement littéraire et artistique né en France à la suite de la Première Guerre mondiale. Il est dans la continuité du mouvement Dada (un mouvement antibourgeois, antinationaliste et provocateur).
Le but du surréalisme est de créer une écriture, une peinture plus spontanée dans laquelle on ne se plie pas aux règles formelles et esthétiques de l’époque, pour faire place à la création sans contrainte. Pour André Breton, leur chef de file, le surréalisme est une recherche d'union entre le réel et l’imaginaire.
Magritte excelle dans la représentation des images mentales. Pour Magritte, la réalité visible doit être approchée de façon objectale.
Il possède un talent décoratif qui se manifeste dans l’agencement géométrique de la représentation.
L’élément essentiel chez Magritte, c’est son dégoût inné de la peinture plastique, lyrique, picturale. Magritte souhaite liquider tout ce qui est conventionnel. « L’art de la peinture ne peut vraiment se borner qu’à décrire une idée qui montre une certaine ressemblance avec le visible que nous offre le monde » déclare-t-il. Pour lui, la réalité ne doit certainement pas être approchée sous l’angle du symbole.
Parmi les tableaux les plus représentatifs de cette idée, La Clairvoyance (1936), nous montre un peintre dont le modèle est un œuf posé sur une table. Sur la toile, le peintre dessine un oiseau aux ailes déployées.
Je vous laisse aller voir de vous-même.
Un oiseau, un oiseau… pour continuer avec Jacques Prévert…
Jacques Prévert a tout d’abord appartenu au mouvement surréaliste. Jacques Prévert fait partie de ce mouvement littéraire de 1925 à 1929. Mais ce dernier est trop indépendant d'esprit pour faire partie d'un mouvement littéraire bien fixe. De plus, il supporte mal les exigences d’André Breton.
Il choisit alors de faire dans la simplicité et de prendre des thèmes de la vie quotidienne. Il s'intéresse à des thèmes qui étaient jusqu'ici considérés comme antipoétique (par exemple, le thème du travail, l’école).
Même s’il a peu écrit pendant sa période avec les surréalistes, ces années passées auprès d'eux, ont été pour lui une période de gestation. Et elle lui ont enfin permis d'être "lui-même ».
Malgré sa rupture avec Breton et ses amis, Prévert reste tout de même marqué par le surréalisme et il pense même que rêve et folie peuvent conduire à une toute autre réalité. Il aime aussi mêler le réel et le surréel : il introduit des éléments oniriques, fantastiques ou merveilleux dans un monde des plus réaliste ou bien il suffit de quelques métaphores pour que le lecteur tombe dans un monde surréel.
Prévert crée un style qui lui est propre où il mêle l’humour, la simplicité, le merveilleux ou le fantastique. Il aime beaucoup jouer avec les mots, il se détache de tout mouvement littéraire précis. Voici « Pour faire le portrait d’un oiseau » :
Peindre d'abord une cage
avec une porte ouverte
peindre ensuite
quelque chose de joli
quelque chose de simple
quelque chose de beau
quelque chose d'utile
pour l'oiseau
placer ensuite la toile contre un arbre
dans un jardin
dans un bois
ou dans une forêt
se cacher derrière l'arbre
sans rien dire
sans bouger...
Parfois l'oiseau arrive vite
mais il peut aussi bien mettre de longues années
avant de se décider
Ne pas se décourager
attendre
attendre s'il le faut pendant des années
la vitesse ou la lenteur de l'arrivée de l'oiseau
n'ayant aucun rapport
avec la réussite du tableau
Quand l'oiseau arrive
s'il arrive
observer le plus profond silence
attendre que l'oiseau entre dans la cage
et quand il est entré
fermer doucement la porte avec le pinceau
puis
effacer un à un tous les barreaux
en ayant soin de ne toucher aucune des plumes de l'oiseau
Faire ensuite le portrait de l'arbre
en choisissant la plus belle de ses branches
pour l'oiseau
peindre aussi le vert feuillage et la fraîcheur du vent
la poussière du soleil
et le bruit des bêtes de l'herbe dans la chaleur de l'été
et puis attendre que l'oiseau se décide à chanter
Si l'oiseau ne chante pas
c'est mauvais signe
signe que le tableau est mauvais
mais s'il chante c'est bon signe
signe que vous pouvez signer
Alors vous arrachez tout doucement
une des plumes de l'oiseau
et vous écrivez votre nom dans un coin du tableau.
Jacques PRÉVERT Paroles 1945
©1972 Editions Gallimard
Ne pas hésiter à acheter l'album de l’exposition ou le catalogue de l’exposition
Et le recueil Paroles de Jacques Prévert
Au vu de l’extrême affluence à l’exposition, pour ceux qui n’aiment pas la foule et l'attente, privilégier les visites en « nocturne » (horaires : Tous les jours (sauf mardi) de 11h à 21h - Nocturne jusqu'à 23h tous les jeudis soirs, et tous les lundis soirs).
Pour découvrir l'exposition avec une visite guidée, cliquez ici
Bonne visite et bonne lecture !