Tenue correcte exigée
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Tenue correcte exigée, quand le vêtement fait scandale est une exposition présentée au musée des Arts Décoratifs du 1er décembre 2016 au 23 avril 2017 : l’occasion de revenir sur les principaux scandales vestimentaires qui ont ébranlé le monde occidental depuis le Moyen-Âge !

Le sujet est intemporel, des débuts de la religion à nos jours, et revient sur le devant de la scène à l’été 2016 avec le burkini : que peut-on et doit-on montrer ou cacher en public ? Quelles sont les règles sociales de l’habillement, que veut-on signifier à travers ce que l’on porte, et pourquoi ? L’exposition répond à ces questionnements à travers 3 thèmes principaux : le vêtement et la règle ; est-ce une fille ou un garçon ? ; et la provocation des excès. Un axe supplémentaire de fin de parcours s’attarde sur les scandales des podiums et les codes transgressés par les créateurs.

En germe depuis 3 ans, l’exposition est portée par Denis Bruna, conservateur au musée des Arts Décoratifs et commissaire de l’exposition. Spécialiste de la mode et du costume, il s’est appuyé sur de nombreux ouvrages dans lesquels il a relevé les vêtements qui avaient particulièrement défrayé la chronique ; de là lui est venu l’idée de la transgression vestimentaire comme constante de l’histoire de la mode.

Organisée en 3 ou 4 grands axes, l’exposition se déroule sur deux étages. Chacun de ces axes est lui-même subdivisé en différentes vitrines qui proposent toutes sortes de pièces d’habillement plus ou moins emblématiques, de la robe de mariée de Brigitte Bardot à l’armure de Jeanne d’Arc, en passant par les premières minijupes et les robes transparentes des Merveilleuses.

Première partie : Règles et conseils
Cette première partie retrace les origines des premiers interdits vestimentaires dans la culture occidentale jusqu’aux blogs internet conseillant telle ou telle tenue, en passant par les lois, les ordonnances royales, les traités de civilité et de savoir-vivre ou encore les émissions actuelles de relooking, qui tous illustrent la permanence des règles vestimentaires au fil des siècles. Elle nous présente aussi les nouveaux gourous de la mode, des blogueurs à Cristina Cordula !

Deuxième partie : Fille ou garçon ?
Cette seconde partie revient sur les travestissements, les confusions que les tenues peuvent engendrer. Et pour commencer, elle insiste sur le rôle de la religion dans les sociétés occidentales, où la Bible a défini l’homme comme parfait et la femme comme imparfaite. Il est donc plus courant que les femmes se vêtent en hommes, quoique le travestissement ait longtemps été interdit et puni par la loi (la loi obligeant les femmes à demander en préfecture l’autorisation de porter des pantalons fut abrogée en 2013 !). Pour les hommes, porter des vêtements de femme est plus rare, car l’efféminement renvoie à la condition inférieure de la femme sur bien des plans.
L’occasion dans cette partie de revenir sur les principaux travestissements : Jeanne d’Arc fut condamnée pour « port du vêtement d’homme » ; Henri III, le dernier des Valois, se vit traité de « putain fardée » pour son goût pour l’hygiène et le maquillage ; Marlène Dietrich s’affichait en smoking dans Cœurs Brûlés en 1930 ; le vêtement unisexe opère un grand retour dans les années 70… Autant d’exemples qui montrent que les scandales vestimentaires se sont bien souvent appuyés sur le travestissement !

Troisième partie : Trop, c’est trop !
Cette partie nous montre, de vitrine en vitrine, toutes les tenues considérées comme « trop ». La tenue doit respecter des codes visuels et formels. Le vêtement ne doit être ni “trop haut, trop court, trop large, trop transparent, trop moulant, trop couvrant, trop froissé ou trop coloré”, sous peine d’être montré du doigt.

Quatrième partie : Défilés chocs
Cette (petite) dernière partie nous présente quelques tenues de grands créateurs qui ont fait scandale lors de la présentation de la collection sur les podiums. Cette partie, non annoncée dans l’introduction de l’exposition, a eu pour conséquence de diversifier le public en faisant venir les férus des grands couturiers.
Elle expose notamment l’une des tenues créée par John Galliano pour Dior en 2000, dans une collection inspirée des sans-abri, ou encore les robes d’Alexander McQueen dans la collection Highland Rape en 1995, présentant des mannequins métaphoriquement violées portant des robes déchirées. Le commissaire pose donc la question de l’intérêt pour le créateur : le scandale permet de gagner en visibilité ; est-ce un moyen pour les créateurs de se démarquer et de se faire connaître ?


L’exposition est globalement bien organisée et son propos pertinent : dès lors, le public est au rendez-vous. Une file d’attente toujours honorable et surtout un certain succès sur Instagram, où les vedettes du réseau en ont aimé l’aspect mode. Le hashtag #tenuecorrecteexigee compte plusieurs centaines de publications. En conclusion, l’exposition prouve son propos : la question de la norme vestimentaire est toujours d’actualité et reste contraignante, en témoignent la robe de Cécile Duflot et le burkini. En cela, le pari de son commissaire est réussi. Et si quelques points de scénographie auraient légèrement pu être améliorés, l’ensemble est clair et bien organisé. Chapeau bas !

À voir jusqu’au 23 avril !


Ecrit par Morgane Metz


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