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Musée d'Orsay
Le
22 June 2019,
1 - Parce que c'est la première exposition du genre en France
Marquée par bon nombre de stéréotypes racistes, l'histoire de la peinture est rarement abordée sous cet angle, alors que beaucoup de représentations de personnes noires ou métisses dans la peinture du XIXe et du XXe siècle demandent à être resituées dans leur contexte historique et par rapport aux préjugés qui marquaient leur époque. Esclavage, abolition de l'esclavage, colonisations, décolonisations, attrait de l'exotisme et influence des voyages et des avant-gardes artistiques... sont autant de mouvements historiques qui marquent le regard des peintres et modifient les représentations des Noirs dans la peinture. Avec cette exposition, le visiteur détient des clés de compréhension et ne regarde plus les tableaux de la même façon.
2 - Pour voir des oeuvres rares
L'intérêt majeur de cette exposition, c'est qu'elle met en relation des peintures, des photos et des documents qui n'avaient jamais été rassemblés, offrant un tableau saisissant de l'histoire de la représentation des personnes noires, redessinant les contours et les couleurs d'une identité malmenée, souvent invisibilisée - y compris dans nos musées - et qui retrouve ici un début de reconnaissance. En ouverture de l'exposition, le "Portrait de Madeleine" (dit précédemment Portrait d'une Négresse") redonne un prénom (à défaut de nom de famille) à un modèle, en réalité une servante noire. ce portrait est est saisissant de dignité. Pose moderne, profondeur psychologique de la représentation : la peintre française Marie-Guillemine Benoist était très en avance sur son temps quand elle réalisa ce portrait en 1800.
3 - Pour le mur de Glenn Ligon
L'oeuvre "Des Parisiens noirs" est signée de l'artiste new yorkais Glenn Ligon. Au fond de la grande nef du musée, se dressent deux grands murs sur lesquels ont été posés des néons immenses, qui mettent en évidence le nom de modèles, artistes ou écrivains noirs présents dans des oeuvres d'art importantes de l'art français du XIXe et du XXe siècle. Symboliquement, ces noms et ces signatures redonnent donc une visibilité à ces figures souvent oubliées par l'histoire, et qui pour certaines, n'avaient pas de nom jusque là.
4 - Pour comprendre la réception de l'Olympia de Manet
A l'époque où le tableau a été présenté, au Salon de 1865, il fait scandale. Manet exécute en apparence une peinture des plus classiques : une femme blanche, nue, et sa servante noire, vêtue et portant un bouquet de fleurs. On a d'ailleurs retrouvé le nom de cette femme noire grâce à un carnet du peintre : elle se nommait Laure. Mais ce qui fit scandale dans ce tableau, c'est que le modèle blanc est une prostituée, mise en scène comme une aristocrate - la servante venant souligner sa richesse. On peut donc lire ce tableau comme une parodie de peinture orientaliste, qui joue sur la tension érotique provoquée par le rapprochements de corps noirs et de corps blancs, et aussi comme un pied-de-nez à l'aristocratie, puisque ce que nous dit Manet, c'est qu'une courtisane parisienne dont les "affaires" marchent bien peut prétendre quasiment au même train de vie. .
5 - Pour décrypter notre propre rapport à l'"exotisme"
Dans la salle consacrée aux artistes de music-hall - dont le clown Chocolat ou la danseuse et chanteuse Joséphine Baker, on comprend que certains clichés ont marqué durablement les esprits et que le corps noir a fait l'objet d'une véritable fétichisation - qui n'a pas complètement disparu dans le monde de la musique ou du spectacle, même si aujourd'hui ces codes sont souvent détournés au 2ème degré. La très célèbre danse de J Baker, vêtue seulement d'une ceinture de bananes, devient très gênante au bout de quelques minutes, lorsqu'on comprend que cette représentation a installé dans les esprits une certaine image de la femme noire - forcément douée pour la danse, volontiers dénudée car proche de l'état de nature", associée aux bananes... En revoyant ce qui est passé longtemps pour un divertissement léger et souriant, on est amenés à réfléchir à ses propres catégories de pensée, aux influences qui façonnent notre façon de voir le monde, quelle que soit notre couleur de peau.
Sonia Zannad / Mes sorties culture
Ecrivez à la rédaction : szannad@messortiesculture.com
Marquée par bon nombre de stéréotypes racistes, l'histoire de la peinture est rarement abordée sous cet angle, alors que beaucoup de représentations de personnes noires ou métisses dans la peinture du XIXe et du XXe siècle demandent à être resituées dans leur contexte historique et par rapport aux préjugés qui marquaient leur époque. Esclavage, abolition de l'esclavage, colonisations, décolonisations, attrait de l'exotisme et influence des voyages et des avant-gardes artistiques... sont autant de mouvements historiques qui marquent le regard des peintres et modifient les représentations des Noirs dans la peinture. Avec cette exposition, le visiteur détient des clés de compréhension et ne regarde plus les tableaux de la même façon.
2 - Pour voir des oeuvres rares
L'intérêt majeur de cette exposition, c'est qu'elle met en relation des peintures, des photos et des documents qui n'avaient jamais été rassemblés, offrant un tableau saisissant de l'histoire de la représentation des personnes noires, redessinant les contours et les couleurs d'une identité malmenée, souvent invisibilisée - y compris dans nos musées - et qui retrouve ici un début de reconnaissance. En ouverture de l'exposition, le "Portrait de Madeleine" (dit précédemment Portrait d'une Négresse") redonne un prénom (à défaut de nom de famille) à un modèle, en réalité une servante noire. ce portrait est est saisissant de dignité. Pose moderne, profondeur psychologique de la représentation : la peintre française Marie-Guillemine Benoist était très en avance sur son temps quand elle réalisa ce portrait en 1800.
3 - Pour le mur de Glenn Ligon
L'oeuvre "Des Parisiens noirs" est signée de l'artiste new yorkais Glenn Ligon. Au fond de la grande nef du musée, se dressent deux grands murs sur lesquels ont été posés des néons immenses, qui mettent en évidence le nom de modèles, artistes ou écrivains noirs présents dans des oeuvres d'art importantes de l'art français du XIXe et du XXe siècle. Symboliquement, ces noms et ces signatures redonnent donc une visibilité à ces figures souvent oubliées par l'histoire, et qui pour certaines, n'avaient pas de nom jusque là.
4 - Pour comprendre la réception de l'Olympia de Manet
A l'époque où le tableau a été présenté, au Salon de 1865, il fait scandale. Manet exécute en apparence une peinture des plus classiques : une femme blanche, nue, et sa servante noire, vêtue et portant un bouquet de fleurs. On a d'ailleurs retrouvé le nom de cette femme noire grâce à un carnet du peintre : elle se nommait Laure. Mais ce qui fit scandale dans ce tableau, c'est que le modèle blanc est une prostituée, mise en scène comme une aristocrate - la servante venant souligner sa richesse. On peut donc lire ce tableau comme une parodie de peinture orientaliste, qui joue sur la tension érotique provoquée par le rapprochements de corps noirs et de corps blancs, et aussi comme un pied-de-nez à l'aristocratie, puisque ce que nous dit Manet, c'est qu'une courtisane parisienne dont les "affaires" marchent bien peut prétendre quasiment au même train de vie. .
5 - Pour décrypter notre propre rapport à l'"exotisme"
Dans la salle consacrée aux artistes de music-hall - dont le clown Chocolat ou la danseuse et chanteuse Joséphine Baker, on comprend que certains clichés ont marqué durablement les esprits et que le corps noir a fait l'objet d'une véritable fétichisation - qui n'a pas complètement disparu dans le monde de la musique ou du spectacle, même si aujourd'hui ces codes sont souvent détournés au 2ème degré. La très célèbre danse de J Baker, vêtue seulement d'une ceinture de bananes, devient très gênante au bout de quelques minutes, lorsqu'on comprend que cette représentation a installé dans les esprits une certaine image de la femme noire - forcément douée pour la danse, volontiers dénudée car proche de l'état de nature", associée aux bananes... En revoyant ce qui est passé longtemps pour un divertissement léger et souriant, on est amenés à réfléchir à ses propres catégories de pensée, aux influences qui façonnent notre façon de voir le monde, quelle que soit notre couleur de peau.
Sonia Zannad / Mes sorties culture
Ecrivez à la rédaction : szannad@messortiesculture.com