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La version originale, la version abîmée et la version "restaurée" du Christ de Borja. La Dépêche.
Le
4 December 2020,
Depuis bientôt 10 ans, une terrible malédiction semble planer sur le monde des beaux-arts en Espagne. Tout a commencé en 2012, le Christ de Borja ou "Ecce Homo", cette peinture de la fin du XIXè – un portrait assez sobre du Christ – peint à même le mur d'une église, à Saragosse. Une octogénaire, peintre du dimanche, s'est autorisée à restaurer l'œuvre, qui montrait certes des signes d'usure dus à l'humidité. Tant qu'elle retouchait la tunique, tout allait bien, ou à peu près, mais les choses se sont corsées quand elle s'est attaquée au visage… Résultat : une tête complètement ratée, grimaçante, déformée, qui a valu à cette restauration désastreuse le surnom de "Christ-singe". La coupable, Cécilia Gimenez, dit avoir agi en toute bonne foi, et agi au vu et au su de tous. Dommage que personne ne l'ait arrêtée en cours de (c)route… Risée du Net, source de mèmes à n'en plus finir (ces images parodiques qui pullulent sur les réseaux sociaux) l'artiste du dimanche a tout de même connu son quart d'heure de célébrité ; elle est désormais plus connue que l'artiste qui a peint le Christ de Borja, un certain Elías García Martínez. Il faut tout de même rendre hommage à Mme Gimenez, responsable d'un petit miracle : grâce à elle, en 2016, le nombre de touristes visitant la ville de Borja est passé de 6 000 à 57 000…et l'argent collecté par l'église pour permettre aux visiteurs de voir la fameuse fresque a permis de financer une maison de retraite!
Dans les années qui ont suivi, d'autres histoires du même genre ont défrayé la chronique – toujours en Espagne. Citons-en deux, qui ont fait grand bruit : il y eut en 2018 cette sculpture en bois du XVIe siècle, peinte au XVIIIè siècle (une riche polychromie), représentant Saint-Georges, à l'église de San Miguel d'Estela. C'est un professeur d'arts plastiques, cette fois, qui s'est attelé à la tâche. Peut-être un peu trop fan de pop art, ou d'art naïf : il a transformé Saint-Georges en jouet Playmobil ou en personnage de BD…Fort heureusement, la statue a ensuite bénéficié d'une restauration digne de ce nom, effaçant les outrages précédents.
Plus récemment, l'été dernier, c'est le modelé délicat du visage d'une Vierge de Murillo (une copie de l'Immaculée Conception de l'Escorial de Murillo pour être tout à fait précis), à Valence, qui a été confié à un restaurateur de meubles pour un petit lifting. Auriez-vous l'idée de demander à un spécialiste de la tapisserie de retoucher une robe Dior? C'est pourtant à peu près ce qui a traversé l'esprit du collectionneur qui a commandé cette "restauration". Il lui en a coûté 1200 € pour obtenir (après une première tentative déjà malheureuse) un visage digne d'un dessin de maternelle.
Monsieur Carrera, ancien président de l’Association professionnelle espagnole des restaurateurs et restaurateurs (Acre), a déclaré au journal britannique le Guardian qu'il regrettait que la loi espagnole autorise les gens à s’engager dans des projets de restauration sans les compétences nécessaires. Car ces affaires sont l'occasion de rappeler que la restauration des biens culturels est un métier on ne peut plus sérieux et technique, qui exige des années d'études et beaucoup d'expérience. Il en va de la préservation des œuvres d'art, ce patrimoine commun qui se transmet au fil des générations.
Mes Sorties Culture / Sonia Zannad
Ecrivez à la rédaction : szannad@messortiesculture.com
Dans les années qui ont suivi, d'autres histoires du même genre ont défrayé la chronique – toujours en Espagne. Citons-en deux, qui ont fait grand bruit : il y eut en 2018 cette sculpture en bois du XVIe siècle, peinte au XVIIIè siècle (une riche polychromie), représentant Saint-Georges, à l'église de San Miguel d'Estela. C'est un professeur d'arts plastiques, cette fois, qui s'est attelé à la tâche. Peut-être un peu trop fan de pop art, ou d'art naïf : il a transformé Saint-Georges en jouet Playmobil ou en personnage de BD…Fort heureusement, la statue a ensuite bénéficié d'une restauration digne de ce nom, effaçant les outrages précédents.
Plus récemment, l'été dernier, c'est le modelé délicat du visage d'une Vierge de Murillo (une copie de l'Immaculée Conception de l'Escorial de Murillo pour être tout à fait précis), à Valence, qui a été confié à un restaurateur de meubles pour un petit lifting. Auriez-vous l'idée de demander à un spécialiste de la tapisserie de retoucher une robe Dior? C'est pourtant à peu près ce qui a traversé l'esprit du collectionneur qui a commandé cette "restauration". Il lui en a coûté 1200 € pour obtenir (après une première tentative déjà malheureuse) un visage digne d'un dessin de maternelle.
Monsieur Carrera, ancien président de l’Association professionnelle espagnole des restaurateurs et restaurateurs (Acre), a déclaré au journal britannique le Guardian qu'il regrettait que la loi espagnole autorise les gens à s’engager dans des projets de restauration sans les compétences nécessaires. Car ces affaires sont l'occasion de rappeler que la restauration des biens culturels est un métier on ne peut plus sérieux et technique, qui exige des années d'études et beaucoup d'expérience. Il en va de la préservation des œuvres d'art, ce patrimoine commun qui se transmet au fil des générations.
Mes Sorties Culture / Sonia Zannad
Ecrivez à la rédaction : szannad@messortiesculture.com