Boire ou lire, il faut choisir…
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Du lien entre un bon livre, un verre et un tableau...

Ah, pauvre Gervaise !  

Sur les bancs de l’école, nous avons lu L’Assommoir de Emile Zola.

Publié en feuilleton dès 1876, septième volume de la série Les Rougon-Macquart, l'écrivain y restitue la langue et les mœurs des ouvriers, tout en y décrivant les ravages causés par la misère et l'alcoolisme.

À sa parution, l'ouvrage est jugé trop cru. Mais c'est ce naturalisme qui, cependant, provoque son succès.  

Dans le roman, un des principaux lieux de débauche est L'Assommoir, où trône le fameux alambic, sorte de machine infernale dont le produit, un alcool frelaté, assomme ceux qui en boivent. Gervaise est au centre du roman. Sa mère la met au régime de l'anisette dès son enfance, buvant plus tard avec elle, parfois jusqu'à l’ivresse. Gervaise est travailleuse, avec un trop bon cœur, ayant horreur de faire de la peine aux gens. Au fil du roman, Gervaise est entraînée vers la paresse, la gourmandise, l'alcoolisme… et l’absinthe.  

En 1876, Zola reconnaîtra sa dette envers Degas : "J'ai tout bonnement décrit, en plus d'un endroit dans mes pages, quelques-uns de vos tableaux".

Encore une, patron !  
C'est une belle plante au charme toxique, qui au 19e siècle fait tourner plus d'une tête. À l'époque, l’absinthe, celle que l'on appelle "la fée verte", titrant entre 45° et 90°, fait fureur dans les salons bourgeois. Mais dans les troquets ouvriers, elle fait aussi des ravages…  

En plus de l’alcoolisme rampant, elle est accusée de provoquer de graves intoxications. En effet, elle contient, entre autres, du méthanol, un alcool neurotoxique, et de la thuyone, très convulsivante et provoquant des sensations de désinhibition, et même, à fortes doses, des hallucinations…

Hallucinations décrites notamment par Émile Zola dans L'Assommoir et ayant probablement alimenté la folie de certains artistes de l'époque (Verlaine, Degas, Van Gogh, Toulouse-Lautrec...).  

Petit à petit la boisson se popularise. Dans les bistrots, elle est sifflée pure et servie directement au verre. Au début du 20e siècle, absinthisme rime avec alcoolisme. La période de 1880 à 1914 marque une explosion de la production. La production française passe de 700 000 litres en 1874 à 36 000 000 de litres en 1910.  

En 1915, la consommation d'absinthe est finalement interdite. Il faut attendre 96 ans pour que l'absinthe soit à nouveau autorisée en France, débarrassée de ses substances toxiques.


Un peu d’Art dans tout ça…  

L’Absinthe, est une célèbre peinture d'Edgar Degas composée entre 1875 et 1876 à Paris et conservée au musée d'Orsay.  

Les deux personnages représentés sont deux amis, l'actrice Ellen Andrée et le peintre et graveur Marcellin Desboutin. Ils ont l’air morne, les vêtements usés, le regard triste. Elle, les épaules tombantes, le regard absent, a le visage pâle dû à l’abus d’absinthe. Ne dirait-on pas Gervaise devant son verre ? Lui, la face ravagée par le vin, détourne son regard. Ne ressemble-t-il pas à Coupeau, autre personnage de L’Assommoir de Zola ?  

Coupeau est un ouvrier zingueur, honnête et travailleur jusqu'à sa chute d'un toit. La peur de remonter sur les toits le font sombrer dans l'ivrognerie.

Les tons dominants utilisés par l'artiste sont le gris, le marron et le noir. La scène se passe au café de la Nouvelle Athènes, place Pigalle, alors lieu de réunion des Impressionnistes.  

Ce qui choque à l’époque, c’est son réalisme outré et son caractère trivial. Degas analyse la scène sans aucune complaisance avec un regard pénétrant, lucide et critique sur les mœurs de son temps. Ce qui rapproche L’Absinthe du naturalisme de Zola…  

Une exposition sur le peintre Degas a lieu au Musée d'Orsay. Profitez d'une visite guidée pour aller voir son tableau L'Absinthe et ses danseuses !

De même, au travers d'une visite du Panthéon, n'hésitez pas à aller sur la tombe d'Emile Zola.

Je vous conseille la lecture de L'assommoir dont René Clément a fait un film.

Un tableau, un livre, toujours sans modération, bien sûr !


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