Depuis le mois d'octobre, il toise les automobilistes de la 10e avenue et les passants qui se promènent sur la High Line, à Manhattan. Lui, c'est un pigeon géant, haut de 5 mètres, sculpture monumentale hyperréaliste réalisée par l'artiste franco-colombien Ivan Argote.

La genèse de ce projet tient à l'esprit provocateur de l'artiste, qui aime installer ses œuvres dans l'espace public et jouer sur les échelles. Le pigeon, animal omniprésent dans les mégapoles du monde entier, est un oiseau mal aimé : on l'associe à la saleté, nuisances sonores, au transport de maladies ou d'allergies, ou encore à la dégradation des monuments. En lui dédiant une telle statue, en lui accordant une telle place, l'artiste lui redonne ses lettres de noblesse, interrogeant au passage notre rapport à la nature (y compris en ville, d'où elle n'est pas absente) et notre façon de hiérarchiser les espèces. Il semble nous dire aussi que l'oiseau est peut-être le véritable roi de la cité, qu'il habite et envahit depuis plusieurs siècles. 

Le pigeon géant a demandé à Argote et à ses équipes 5 années de travail, entre modélisation et réalisation : il s'agit autant d'une sculpture géante (en aluminium) que d'une peinture géante, devant résister aux intempéries pendant plusieurs mois (elle sera désinstallée au printemps 2025).

L'artiste a baptisé sa sculpture "Dinosaure", créant une distance ironique avec son sujet : comment comparer cet oiseau familier à des créatures effrayantes disparues il y a 66 millions d'années? Et pourtant, les oiseaux sont bel et bien les descendants des dinosaures. A cette échelle, on le remarque d'autant mieux, par exemple en observant les pattes de l'oiseau. Car ce pigeon fait précisément la taille d'un T Rex! De quoi changer de regard sur ce "rat volant" avec lequel nous cohabitons quotidennement.

Mes Sorties Culture / Sonia Zannad

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